Géorgie – Le monastère Davit Gareja

Une journée dans le semi-désert de Gareja à la découverte de monastères

Quelques informations avant de partir…

Le monastère Davit Gareja Lavra est très connu en Géorgie et est l’un des sites religieux témoins de l’histoire du pays. Il est situé à la frontière de la Géorgie avec l’Azerbaïdjan.

Nous avons lu que, dû à sa situation géographique, il était plus sûr de s’y rendre avec un guide en cas de contrôle d’identité par l’Azerbaïdjan. Même si nous n’avons pas compris pourquoi, nous avons préféré jouer la carte de la sécurité et choisi de passer par une agence. Celle-ci nous a proposé deux options pour nous rendre au monastère :  soit par la route principale ou par des pistes traversant le désert de Gareja. Nous nous sommes décidés pour la seconde où les chemins sont beaucoup plus accidentés, mais les paysages beaucoup plus sauvages. 

C’est aussi un circuit que nous n’aurions pas pu faire avec notre voiture…

Pour en revenir aux contrôles, il n’y a pas de quoi s’inquiéter. Nous avons demandé à notre guide qui nous a expliqué qu’il y avait effectivement des tensions entre la Géorgie et l’Azerbaïdjan à propos de la bande de terre qui longe la frontière à cet endroit. Il est cependant possible d’aller visiter le monastère par ses propres moyens et sans aucun risque.

Le conflit entre la Géorgie et l’Azerbaïdjan en quelques mots 

À l’époque soviétique la frontière entre les deux pays a été modifiée, ce qui a entraîné la division du complexe du monastère Davit Gareja. La conséquence est que la partie Azerbaïdjane de ce lieu sacré leur est depuis interdite d’accès.
Après le départ des Russes, le gouvernement géorgien a pu enfin contester cette frontière. De 1996 à 2007, une commission assignée à la délimitation des frontières a travaillé sur le problème, jusqu’à ce qu’un accord soit signé avec Bakou en 2007. Cet accord confirma cependant la position actuelle de la frontière — celle définie par la Russie, ce qui obligea la Géorgie a concédé 3 500 hectares de terres à son voisin.

Mais la Géorgie continue de se battre pour sauver cet héritage culturel. Dans sa revendication, elle conteste le choix fait par la commission quant aux cartes topographiques devant être utilisées pour l’analyse.

En effet, l’étude a été faite à partir de cartes topographiques éditées en 1970 sous l’occupation russe à l’échelle 1 : 500 000 alors qu’il existe d’autres cartes, éditées dans les années 1930 à l’échelle 1 : 200 000, qui correspondraient aux frontières historiques de la Géorgie. C’est sur la base de ces dernières que Tbilissi voudrait que la frontière soit redéfinie, cartes que l’Azerbaïdjan aurait d’ailleurs refusé de considérer à l’époque du traité. 

L’organisation de notre journée

  • Départ de Tbilissi (petit coeur en haut à gauche de la carte) à 9 h 00
  • Visite du monastère Garejis Sabereebi
  • Visite du monastère Davit Gareja Lavra
  • Repas géorgien dans une maison d’hôtes à Udabno
  • Découverte du lac artificiel de Mravaltskaro
  • Retour à Tbilissi à 18 h 00

Nous allons partir pour une journée bien remplie !

Notre road trip

Notre guide est venu nous chercher au volant d’un gros 4X4, indispensable pour la traversée du semi-désert. On parle d’un semi-désert car on y trouve de la végétation et de l’eau.

Quand nous y sommes allés en août, les plaines étaient plus vertes que les autres années, le mois de juillet ayant été particulièrement pluvieux.

Après une première partie de route confortable et un arrêt dans une boulangerie pour un petit-déjeuner au bord de la route à base de baguettes géorgiennes, nous atteignons le désert. Nous quittons la route goudronnée pour des chemins en terre, qui deviendront de plus en plus accidentés au fur et à mesure de notre avancée.

Quelques vues des différents paysages tout au long de notre route…

L’histoire du monastère Davit Gareja Lavra

Davit Gareja Lavra est le premier de tous les monastères géorgiens orthodoxes construits dans ce désert.

Il a été fondé par Davit Gareja, l’un des 13 moines ascétiques qui sont revenus du Moyen-Orient pour répandre le christianisme en Géorgie au 6e siècle. Son idée était de fonder une communauté dans un lieu isolé, loin de toute civilisation. Il quitta la ville et s’enfonça dans le désert jusqu’à enfin trouver l’emplacement idéal; une petite grotte au milieu d’une falaise. Elle se trouve aujourd’hui au centre du monastère et sera la première pièce de ce qui deviendra l’un des plus grands complexes monastiques du pays. Quinze monastères seront creusés dans la roche, et l’ensemble s’étendra sur plus de 7 km.

Malheureusement, les différentes invasions qui suivirent mettront à mal ces lieux sacrés.

Le visage effacé d’une des fresques

Les Mongols les détruisirent en partie en 1265, effaçant les visages des saints dessinés sur les fresques.

Ils furent alors abandonnés jusqu’au début du 14e siècle, date à laquelle le nouveau roi de Géorgie, Giorgi V le Brillant, qui mis fin à l’occupation mongole, les réhabilita.

Mais au printemps de l’année 1400, ils furent de nouveau démolis par Timur, un conquérant turco-mongol, puis complètement anéantis la nuit de Pâques 1615, lorsque les soldats du Shah Abbas d’Iran tuèrent 6 000 moines et mirent à sac la plupart de leurs trésors artistiques.

Ils n’ont été restaurés que bien plus tard après le retrait des Russes de Géorgie, et quelques moines habitent dorénavant à Davit Gareja Lavra.

Nos visites

Le monastère Garejis Sabereebi

Il nous a fallu deux heures pour atteindre ce monastère qui se trouve à 70 km au sud-est de Tbilissi. Je me suis d’ailleurs fais la remarque que les moines avaient vraiment trouvé l’endroit parfait pour s’installer loin de tout. Même maintenant, l’endroit est toujours déserté et nous n’avons croisé personne durant toute notre circuit. 

Un village particulier

À l’entrée du désert, nous avons traversé un village qui se trouve être le dernier dans cette partie de la Géorgie avant la frontière avec l’Azerbaïdjan. La particularité de ce village est qu’il est habité par des Azerbaïdjanais ayant conservé leur langue et leur culture. La majorité ne parle d’ailleurs pas géorgien. Ils sont pour la plupart éleveurs de moutons, et vendent leur viande aux pays musulmans voisins.

Une situation que j’ai trouvé assez surprenante.

Finalement, nous nous dirigeons en direction d’un petit bout de falaise dans lequel on aperçoit des ouvertures. Nous sommes au pied d’un des vestiges du monastère datant des 9-10e siècles.

Le premier site que nous avons visité
Un peu plus loin, un deuxième site qui faisaient partie du même ensemble. C’est dans celui-ci que nous avons pu admirer les fresques

En effet, abandonné depuis 200 ans, il ne reste plus que quelques grottes en pierre de sable creusées à la main. Mais malgré leur état délabré, certaines permettent encore la découverte de quelques fresques colorées.

La photo est plus impressionnante que la réalité !

Pour atteindre les différentes entrées, nous avons dû longer une crête située au seuil des différentes pièces.

Notre guide nous a donné à chacun une paire de bâtons qui se sont avérés très utiles. Il n’y a pas de sentiers réellement tracés et la terre est très friable. Elle l’est d’ailleurs tellement qu’il est impossible de s’aider d’un “rocher” pour grimper, au risque qu’il nous reste dans la main.

Notre guide nous a aussi expliqué qu’à chaque précipitation, le terrain est ravagé et que le paysage change. Ce qui est particulièrement durant la saison des pluies.

Le monastère

Initialement, il était composé de centaines de grottes disposées en groupe adjacent les uns aux autres. Il y avait des églises en forme de dôme, des chapelles, des réfectoires, des logements et des zones de stockage. Il était possible de communiquer d’un point à l’autre du monastère par des allées creusées dans la roche. Elles ont malheureusement disparu de nos jours.

Il n’y a aucunes archives écrites sur ce monastère. Il a d’ailleurs été oublié jusque dans les années 1960, quand un historien géorgien du 19e siècle le redécouvre.

On retrouve ici aussi une des particularités des églises catholiques; la nef est dirigée à l’est.
Car c’est “à l’est que le soleil se lève et que la lumière triomphe des ténèbres”.

Par analogie, les textes chrétiens considèrent que c’est par ce côté que Jésus fera son retour parmi les hommes. Lors de la messe, les croyants prient ainsi dans cette direction dans l’attente sa seconde venue.
Par opposition, l’ouest, où le soleil se couche, symbolise la mort.

Cette peinture date du 9e siècle et se caractérise par sa couleur chaude.
Dans le sanctuaire, sur fond de ciel étoilé, le Christ est représenté assis sur le trône avec les archanges. Il porte une longue chemise, typique du début du moyen-âge.
Sur la partie inférieure de l’autel se trouvent d’anciens apôtres et diacres. 

Les moines n’étaient pas les seuls à vivre ici. Ils étaient parfois rejoints par de riches militaires qui, entre deux guerres, venaient chercher la paix et du réconfort.

Le monastère Davit Gareja Lavra

Notre première vue du monastère. De l’autre côté de la montagne, c’est l’Azerbaïdjan, où il est impossible de monter pour découvrir l’ensemble du monastère, ou admirer la vue sur ce pays. Il parait que l’on peut voir à des kilomètres à la ronde…

On peut apercevoir la première grotte de Davit Gareja au milieu de la cours

C’est cette partie du monastère qui est actuellement habitée par quelques moines.

La grotte qui fût habitée par Davit Gareja avec une icône à l’intérieur

Après ces visites, nous avions rendez-vous à la maison d’hôtes pour notre repas géorgien. Notre guide nous averti à l’avance que le repas va être gargantuesque, et que c’est l’une des facettes de l’hospitalité géorgienne ! Et je vous avoue que nous avons été servis comme des rois. La table étaient remplie de spécialités, toutes plus délicieuses les unes que les autres.

Après ce festin, il a été difficile de ne pas s’endormir sur la route du réservoir de Mravaltskaro.

C’est donc l’estomac bien calé que nous repartons pour 30 min de route jusqu’à notre destination suivante.

Le réservoir de Mravaltskaro

Je ne savais pas à quoi m’attendre, car pour moi, un réservoir est “une cuve bétonnée remplie d’eau”. J’ai découvert par la suite que ce qu’ils appellent ici « réservoirs » sont en fait des lacs artificiels.

Celui-ci a été créé par les Russes, est servait de réserve d’eau pour l’alimentation des systèmes d’irrigation des cultures.
Aujourd’hui il n’y a plus de plantations et le lac est devenu un lac de pêche. Ses berges sont également une aire de camping sauvage où les locaux viennent passer des soirées au calme.

Le lac lui-même n’a rien d’exceptionnel. Mais nous sommes allés à son autre extrémité pour découvrir pourquoi cet endroit vaut le détour. La beauté et la particularité du lieu; les collines qui entourent le lac. Nous sommes sortis de la voiture et sommes partis pour une courte promenade qui nous a conduits au sommet de l’un d’eux.

Les collines sont incroyables de couleur ! Et ce qui est étrange, c’est que ce nous n’avons rien vu de semblable durant notre journée lors de notre traversée du désert. Juste ici !

Cette zone reste un endroit du désert de Gareja très peu connue et rarement visité
Un sol bien particulier

Du fait de la sécheresse, la terre est très friable et se creuse facilement. 

L’amalgame de petits cailloux multicolores qui donne les différentes couleurs aux collines.

Mais ce qui fût un avantage lors de la construction des grottes, s’avéra être un désavantage lors des invasions. Elles ont pu être détruites aisément, et les intempéries et l’érosion continuent à joué un rôle important dans leurs disparitions. 

Un dernier coup d’oeil sur les alentours, et c’est le retour pour Tbilissi.

Le mot de la fin

Je ne suis absolument pas fan de circuit en 4X4. Je préfère d’autant les randonnées à pied ou à cheval quand c’est possible. Mais malgré ma réticence du début, je dois avouer qu’il aurait été dommage de ne pas découvrir ces paysages et cette partie de la Géorgie. 

Nul part ailleurs, je n’ai vu des paysages semblables. Il faut ajouter à cela l’atmosphère du désert, son silence et sa quiétude, et la beauté des lieux saints qui se dressent dans cette immensité. Il est impossible de rester de marbre. J’aime à imaginer que les paysages que les moines voyaient en ces temps-là sont les mêmes que ceux que j’ai pu admirer.

Ce fut une très belle journée qui nous a menés sur les pas d’une des premières communautés catholiques de Géorgie.

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